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TSMC et InFo PoP pour l'A10 de l'iPhone 7

Publié le 19/09/2016 à 14:38 par Guillaume Louel

Ce week end, la société Chipworks a procédé à son traditionnel "teardown" des puces incluses dans l'iPhone 7 , en se concentrant particulièrement sur le SoC A10 d'Apple.

Rappel sur l'A9

Avant de regarder l'A10, revenons un instant sur l'A9 inclus l'année dernière dans l'iPhone 6S. Il avait la particularité d'être sourcé en parallèle chez Samsung et TSMC, quelque chose de quasi unique pour des puces haut de gamme sur des process de dernière génération, ce qui nous avait permis d'effectuer quelques comparaisons.


Les deux A9 de l'iPhone 6S (2015)

La différence la plus visible était la densité des deux process : l'A9 "Samsung" mesurant 96mm2, contre 104.5mm2 pour la version TSMC. A l'époque nous n'avions pas de certitudes sur les variantes exactes des process utilisées. Depuis, Chipworks a confirmé qu'il s'agissait bien du 14LPE chez Samsung. Le cas de TSMC est plus compliqué, Chipworks ne répondant pas (gratuitement) à la question. Les rumeurs laissent penser qu'il ne s'agissait pas d'un simple 16FF, mais d'une version "custom" empruntant en partie au process 16FF+.

Outre la densité, les tests pratiques avaient suggéré une différence de consommation à pleine charge avec un avantage pour la puce de TSMC. De quoi laisser penser que son process avait besoin de tensions inférieures à celui de Samsung pour obtenir les mêmes performances.

Depuis, Chipworks a la aussi répondu partiellement à la question suggérant que le problème se situerait pour le process de Samsung sur le rapport puissance/performances de ses NMOS . On ne sait pas si le problème persiste sur la version 14LPP qui a remplacé le 14LPE.

L'A10 : 16FFC TSMC

Première différence par rapport à l'année dernière, l'A10 semble produit cette année exclusivement par TSMC. Il est plus large que l'A9, mesurant 125mm2 pour 3.3 milliards de transistors annoncés. Côté process il s'agit du 16FFC (ou d'une variante) de TSMC, la troisième version "optimisée" du 16nm de TSMC. Annoncée en janvier dernier, le C signifie "Compact" et ce process vise avant tout les usages basses consommation tout en réduisant de manière significative les coûts de fabrication.

D'après Chipworks, l'utilisation des bibliothèques optimisées permet une bien meilleure utilisation du die, avec une compacité équivalente à celle des process TSMC précédents. Chipworks estime que la même puce aurait demandé 150mm2 en 16FF. Etant donné que 70 tapeouts de clients de TSMC sont attendus sur ce process cette année, les progrès de densité du 16FFC devraient profiter assez largement, on attendra de voir les constructeurs qui annonceront des puces l'utilisant.

 
 

Chipworks note également que l'A10 est beaucoup moins haut que les générations précédentes. Comme beaucoup de SoC, il est de type PoP et embarque la mémoire au dessus du die logique. Cependant plutôt que d'empiler les quatre dies de mémoire (2 Go de LPDDR4 Samsung sur l'A10 de l'iPhone 7), ils sont placés côte à côte.

Qui plus est, comme nous le supposions la puce utilise le nouveau packaging InFo de TSMC (dans sa version InFo-PoP) pour relier les dies entre eux.

big.LITTLE et performances

Côté performances les premiers benchmarks synthétiques évoquent 40% de gains pour le CPU ARM par rapport à l'année dernière, tout en restant en 16nm.

Pour arriver à ce gain, Apple augmente d'abord significativement la fréquence, passant de 1.85 GHz sur l'A9 à 2.35 GHz sur l'A10. Sur ce point, la marque exploite à la fois la marge notée de son process l'année dernière (on peut supposer facilement que l'A9 aurait eu une fréquence plus élevée s'il avait été sourcé uniquement chez TSMC) et les gains apportés par le 16FFC.

Ce gain de 27% de fréquence est accompagné de changements au niveau de l'architecture. Ceux ci ne sont pas encore connus, au delà du nom Hurricane, mais Chipworks note que le cluster CPU prend une place plus importante sur le die, 16mm2 face à 13mm2 sur l'A9, malgré l'utilisation d'un process plus compact.

Il est cependant difficile de se baser sur cette différence de taille étant donné que l'A10 est en réalité un quad core big.LITTLE dans la nomenclature ARM. En plus des deux coeurs hautes performances à 2.35 GHz (big), deux coeurs basse consommation à 1.05 GHz (LITTLE) sont également présents sur le die (leur emplacement exact est pour l'instant inconnu, ce qui vaut les points d'interrogation sur le diagramme au dessus).

Contrairement à d'autres implémentations dans l'écosystème ARM, les applications ne peuvent pas utiliser en simultanée les deux blocs de coeurs, le passage de l'un à l'autre étant transparent pour elles (géré par la puce et l'OS). L'intérêt de cet arrangement est bien entendu d'augmenter l'autonomie en ne sollicitant les coeurs haute performances que lorsque nécessaire.

Déjà largement en avance côté performances sur le reste de l'écosystème ARM, l'A10 commence à devenir embarrassant même pour Intel, dépassant un Core M Skylake en monothread sous Geekbench 4 (voir ici  et là  ), avec un "TDP" au moins deux fois inférieur (et sans mécanisme Turbo).

Intel se consolera tout de même de sa présence dans une partie des iPhone 7 car c'est l'autre information de Chipworks, la société confirme qu'une partie des modèles utilise un modem Intel XMM 7360 (certains modèles intègrent un modem Qualcomm X12). Très en retard, le XMM 7360 est un modem LTE 450 Mb/s Cat 10 certes dessiné par Intel, mais fabriqué selon toutes vraisemblances comme ses prédécesseurs... par TSMC.

7nm fin 2018 pour GlobalFoundries ?

Publié le 16/09/2016 à 13:06 par Guillaume Louel

GlobalFoundries a publié un communiqué de presse  annonçant officiellement son prochain process FinFet, qui sera en 7nm. On rapellera que le process 14 FinFET actuel de GlobalFoundries, le 14LPP, a été développé par Samsung suite aux problèmes de développement du 14XM (la version interne du 14nm de GlobalFoundries, abandonnée).

Comme nous vous l'avions indiqué, GlobalFoundries ne proposera pas de 10nm, son prochain process sera donc un 7nm, baptisé tout simplement 7nm FinFET. Comme souvent, le communiqué du fondeur est particulièrement flou, indiquant à la fois que ce 7nm FinFET profitera des "années d'expérience d'IBM", tout en se "construisant sur le succès du 14LPP".

Le fondeur donne deux chiffres, tout d'abord une densité double par rapport "aux process 16/14", et un gain de performances de 30%. On notera avec circonspection que chez TSMC par exemple, le 10nm est annoncé comme 2.1x plus dense que son 16nm, et que son 7nm sera 1.63x plus dense que son 10nm. Autant dire que le 2x annoncé par GlobalFoundries ne semble pas vraiment au niveau d'un "7nm".

Techniquement le fondeur confirme qu'il s'agira d'un process FinFET optique, avec éventuellement la possibilité d'utiliser de l'EUV si disponible sur quelques couches.

Côté délais, GlobalFoundries annonce une production "risque" début 2018. A titre de comparaison, le 7nm de TSMC est annoncé en production risque début 2017, avec une production volume démarrant en Q1 2018.

Sur le papier donc, ce communiqué de presse de GlobalFoundries est tout simplement inquiétant, dévoilant un 7nm dont les caractéristiques techniques semblent assez lointaines de ce que proposera un TSMC ou un Samsung. Et qui sera disponible qui plus est avec un retard d'au moins 6 mois, et possiblement plus, par rapport au planning - certes incroyablement agressif - de TSMC.

Si la CEO d'AMD, Lisa Su, se satisfait dans le communiqué des développements "à long terme" de GlobalFoundries, cette annonce assez peu flatteuse du fondeur explique probablement pourquoi il a accepté de lâcher du lest auprès d'AMD. Nous vous en parlions en détail en début de mois, AMD et GlobalFoundries ont renégocié leur Wafer Supply Agreement avec pour résultat la levée de multiples clauses d'exclusivités qui liaient les deux sociétés.

Nouvel accord WSA entre AMD/GlobalFoundries

Publié le 01/09/2016 à 16:19 par Guillaume Louel

AMD vient d'annoncer par un communiqué avoir négocié un sixième amendement de son contrat cadre les liant à GlobalFoundries. Pour rappel, AMD avait transféré fin 2008 son activité fabrication (ses usines) dans une nouvelle entité (FoundryCo) détenue à l'époque en partie par AMD (44%) et par ATIC, un fond souverain d'Abu Dhabi. Une société que l'on connaît désormais commercialement sous le nom de GlobalFoundries, et qui est, depuis 2012, complètement indépendante d'AMD.

En 2009, AMD et FoundryCo (que l'on appellera GloFo par la suite pour simplifier, même si tous les accords sont encore aujourd'hui signés au nom de FoundryCo) avaient signé un accord cadre, appelé Wafer Supply Agreement. Cet accord obligeait AMD a acheter un certain volume de wafers (les galettes de silicium qui servent à la fabrication des puces) chez GlobalFoundries, avec des exclusivités pour tout ce qui concernait les CPU (MPU dans les documents), ainsi qu'un "plan" pour la fabrication exclusive à terme de GPU.

L'accord n'est pas totalement public, les très curieux pourront en retrouver une version sur le site de la SEC américaine . De nombreux détails confidentiels n'apparaissent pas. Le contrat court au minimum jusque mars 2019 et au maximum jusqu'en 2024.

Si l'accord est souvent décrit comme un poids pour AMD, on notera que le contrat dispose d'un grand nombre de clauses contraignantes pour son partenaire, concernant par exemple les yields, et le développement de nouveaux process. Et si les exclusivités indiquées plus haut sont dans le document, des mécanismes de "second source", autorisant AMD a aller fabriquer un certain volume de puces chez un concurrent de GloFo dans certaines conditions, particulièrement en cas de défaillance sur certains points techniques.

Reste qu'au fil des années, AMD et GloFo ont amendé ces accords, d'abord en 2011  en changeant les modalités de paiement sur le 32nm (paiement par puce fonctionnelle au lieu d'un prix fixe par wafer, pour tenter de compenser les mauvais yields de l'époque). En 2012, le second amendement  au contrat repassait à un prix par wafer, mais levait certaines exclusivités sur la fabrication d'APU (pour un coût élevé de 703 millions de dollars).

L'amendement signé fin 2012  était beaucoup plus tendu, insistant sur les obligations d'AMD à utiliser GlobalFoundries, et forçant AMD a payer des pénalités (de 320 millions de dollars) pour ne pas avoir utilisé tout le volume négocié lors du précédent amendement. L'accord de volume est en effet de type take-or-pay, un volume de wafers est défini au début d'une période et si AMD ne fait pas produire ce volume, il doit payer des pénalités équivalent au prix des wafers qu'il aurait du commander.

Le quatrième amendement  signé en mars 2014 prévoyait encore une fois de pousser la transition des APU consoles et des GPU vers GloFo. Le dernier amendement en date  avait été signé en avril 2015 et montrait une fois de plus la tension entre les deux sociétés, la question de la fabrication des APU des consoles par TSMC semble au coeur du malaise, le document accuse aussi AMD d'avoir "renommé" certains produits par rapport à l'accord précédents pour se défaire de ses obligations (la partie rédigée de l'accord indiquerait, pour chaque produit, si l'exclusivité de GlobalFoundries s'applique ou non).

GlobalFoundries est bien entendu loin d'être innocent dans ces problèmes même si cela ne se lit pas dans les amendements ou AMD est quasi systématiquement pointé du doigt. On se souviendra de l'incapacité de GloFo a mettre au point ses process 20nm et 14nm, optant au final pour prendre sous licence le process 14nm de Samsung fin 2014.


Polaris P10, GPU fabriqué par GlobalFoundries

Les tensions semblaient cependant s'amenuiser ces derniers mois, AMD validant fin 2015 le process 14nm de son partenaire. On aura même vu arriver - enfin - des GPU fabriqués chez GloFo avec les Polaris/RX 480, ce qui laissait penser qu'AMD aurait un peu moins de mal a tenir les volumes d'achats imposés par le contrat cadre.

C'est dans ce contexte qu'AMD et GlobalFoundries viennent donc d'annoncer le sixième amendement au Wafer Supply Agreement. Plutôt que de renégocier tous les ans l'accord, cet amendement porte pour une période de cinq années, allant de janvier 2016 jusqu'au 31 décembre 2020 (soit au delà de la date théorique minimale de fin du contrat).

 
 

Le texte complet n'est pas encore disponible sur le site de la SEC, on se contentera donc de la présentation d'AMD à ses investisseurs que vous pouvez retrouver ci-dessus.

Le premier point à noter est que le modèle take-or-pay est enfin mis de côté. Il est remplacé par des "objectifs" d'achats annuels qui ont, qui plus est, été revus à la baisse. Ces objectifs étaient de 1.2 milliards de dollars en 2014 et 1 milliard en 2015, des chiffres complexes a atteindre pour le constructeur qui aura enchaîné les pénalités ces dernières années.

Pour 2016, l'accord prévoit seulement 650 millions de dollars, un chiffre beaucoup plus raisonnable, et les objectifs augmenteront annuellement, dans une proportion pour l'instant non indiquée. Les pénalités ne porteront que sur une portion de l'objectif non tenu (et non la totalité, comme dans un accord take-or-pay).

En ce qui concerne le coût des wafers, ils seront fixes pour 2016 et un système est mis en place pour les recalculer chaque année. GlobalFoundries et AMD collaboreront pour le développement du 7nm même si en pratique aucun détail n'est donné.

AMD s'offre également plus de flexibilité, les exclusivités dont nous parlions dans les amendements précédents semblent (au moins en partie) levées et AMD pourra choisir librement de fabriquer des puces, par exemple, chez TSMC.

GlobalFoundries ne fait bien évidemment pas ces concessions gratuitement. AMD va effectuer un paiement de 100 millions de dollars à son partenaire (sur quatre trimestre à compter du dernier trimestre 2016) et va également donner un mandat d'achat de 75 millions d'actions à une filiale de Mudabala (le nouveau nom d'ATIC, maison mère de GlobalFoundries). Le coût de l'opération est de 235 millions de dollars et empeche Mudabala de prendre une participation dans le capital d'AMD de plus de 20%.

Dernière concession faite par AMD, et non des moindres, la société devra effectuer un paiement à GlobalFounrdies chaque trimestre, sur ses volumes de productions effectués chez ses concurrents (comme TSMC ou Samsung). Le montant à payer n'est pas précisé.

En résumé...

Sans les détails exacts, il est très difficile de porter un jugement définitif sur l'accord, mais un certain nombre de points semblent aller dans le bon sens pour AMD.

Si la société avait jusqu'ici continué à utiliser TSMC pour la fabrication de GPU et de certains APU, cela était surtout lié à l'incapacité de GlobalFoundries de tenir ses engagements techniques. Sur le 14nm, les choses ont changées, ce qui nous a valu l'arrivée des Polaris, fabriqués chez GlobalFoundries. L'existence des clauses d'exclusivités risquaient d'empêcher AMD de facto à utiliser TSMC pour la fabrication de GPU.

Ce nouvel accord permet donc a AMD de choisir un peu plus librement entre GlobalFoundries et TSMC pour certains produits, ce qui ne peut qu'être une bonne chose. Devoir effectuer un paiement chaque trimestre sur la fabrication de puces chez TSMC jouera sur les marges d'AMD, mais cela reste un moindre mal à nos yeux, au moins pour le court terme. Cumulé aux pénalités réduites et aux objectifs d'achats revus à la baisse, on pourrait penser à priori que sur un pur plan financier, l'accord semble avantager un peu plus AMD que les accords précédents, quasi à sens unique.

Il ne faut pas oublier que si les choses se sont apparemment arrangées techniquement pour le 14nm chez GlobalFoundries, c'est avant tout grâce à la licence prise chez Samsung. Et pour le 7nm (GlobalFoundries saute pour rappel le 10nm), il s'agira à nouveau d'un développement interne. En cas de retards de GlobalFoundries sur le 7nm (ce qui, une fois de plus, est loin d'être impossible), AMD devrait pouvoir déporter plus facilement sa production chez TSMC (ou éventuellement Samsung) plutôt que de se retrouver lié par les clauses d'exclusivité.

Intel Custom Foundry prend une licence ARM !

Publié le 17/08/2016 à 16:25 par Guillaume Louel

ARM l'a confirmé par un post de blog  : Intel Custom Foundry, l'activité fabrication tiers d'Intel, est désormais détentrice d'une licence ARM Artisan pour le 10nm !

Il faut rappeler qu'Intel est plutôt un cas à part dans le monde des semi-conducteurs, étant l'une des rares sociétés à disposer de ses propres usines, utilisées quasi uniquement pour la production de ses propres puces. La plupart des autres acteurs du marché ont migré vers la séparation de l'activité design d'un côté (on parle de sociétés fabless, c'est le cas dans le monde du GPU avec AMD et Nvidia), et de l'autre la fabrication dans des sociétés tierces spécialisées (on parle de foundry, la plus connue étant TSMC qui fabrique des puces pour de multiples clients).

Avec la difficulté de la mise au point des nouveaux process de fabrication, qui n'a fait qu'empirer ces dernières années, il est de plus en plus complexe pour une société à elle seule de justifier l'investissement nécessaire pour faire évoluer sans cesse ses usines. Qui plus est, la réduction de la taille des transistors fait que la capacité des usines augmente d'année en année, et qu'il faut disposer de très larges volumes de puces à produire, au risque de voir ses usines tourner à vide.

Un casse tête qui aura poussé plusieurs sociétés à se séparer de leurs usines (pour des raisons différentes) d'abord AMD en 2009 (créant GlobalFoundries) et plus récemment IBM (dont l'activité fabrication à été rachetée elle aussi par GlobalFoundries).

Depuis quelques années, en plus de fabriquer ses propres puces dans ses usines, Intel a décidé d'entrer très timidement, en 2010, sur le marché des fondeurs tiers en ouvrant son process à de petites sociétés qui n'étaient pas en concurrence directe avec ses produits (le premier client était Achronix, designer de FPGA en 22nm). D'autres clients ont suivi, principalement sur les FPGA, le client le plus connu d'Intel ayant été Altera... même si au final Intel aura décidé de racheter son client à la mi-2015 !

Pour Intel, la nécessité d'ouvrir ses usines est un casse tête. D'un côté, la société tente d'être présent sur tout les marchés, en déclinant le x86 - technologie "maison" sur laquelle la concurrence est limitée - à toutes les sauces et avec un soupçon de recyclage, que ce soit avec des produits serveurs spécialisés comme les Xeon Phi basés sur des Pentium pour leur première génération, ou les Quark dédiés à l'embarqué et utilisant une architecture de 486 datant d'une bonne vingtaine d'années !

Si l'envie de la société d'être présente sur tous les marchés est là, en pratique les succès ne sont pas systématiquement au rendez vous, Intel ayant par exemple massivement raté le marché des smartphones. Cumulé à la baisse continue des ventes sur le marché historique des PC, l'ouverture des usines à des clients tiers se dessine de plus en plus comme une nécessité pour Intel, même si l'avouer semble impossible à la société, qui continuait donc d'envoyer des signaux mitigés aux possibles futurs clients de son activité fabrication.

Avec l'annonce d'aujourd'hui, les choses sont - peut être - en train de changer puisque la prise de licence ARM par Intel est tout sauf anodine. Ce n'est pas la première fois qu'Intel fabriquera des SoC ARM, on l'avait vu avec Altera qui utilisait un core ARM dans un usage très spécifique.

La licence Artisan Physical IP  inclut en effet toutes les briques nécessaires pour la création de puces ARM de tout types. Il s'agit de tous les blocs de base avec des bibliothèques haute densité et haute performance de transistors logiques,et également tout le nécessaire pour les différents types de mémoire. La licence inclut surtout POP IP, qui est pour rappel l'idée qui fait le succès d'ARM : permettre l'utilisation de blocs interchangeables et compatibles pour créer des puces custom. Ainsi un client peut choisir d'utiliser des coeurs CPU dessinés par ARM (les gammes Cortex) ou créer ses propres coeurs (c'est le cas d'Apple et plus récemment de Nvidia), de choisir un GPU (que ce soit les Mali d'ARM, ou les populaires PowerVR d'Imagination Technologies), et également de choisir son fournisseur pour les interconnexions.

Concrètement, Intel va donc "porter" ces bibliothèques d'ARM aux particularités de son futur process 10 nm, ce qui permettra aux partenaires d'ARM de porter à leur tour - s'ils le souhaitent - leurs blocs POP IP. ARM et Intel travailleront conjointement pour le portage de deux futurs blocs CPU ARM Cortex-A (probablement un autre successeur 10nm de l'A72, voir l'annonce de l'A73 en 10nm lui aussi), la déclinaison que l'on retrouve dans les smartphones et tablettes.

Faut il y voir un virage pour Intel ? Fabriquer des puces ARM pour smartphones, ce qu'ils feront pour LG (nouveau client annoncé dans la foulée) va forcément à l'encontre des ambitions internes d'Intel d'imposer le x86 sur mobile. Car si un peu plus tôt dans l'année Intel avait décidé d'annuler sa nouvelle génération de SoC pour smartphones (Broxton et SoFIA), le constructeur continuait en interne à travailler sur les générations suivantes tout en essayant de développer dans l'intérim son activité modem (Intel aurait possiblement gagné le marché du modem du prochain iPhone). A l'heure où ARM augmente ses ambitions pour aller attaquer le marché juteux des serveurs, on peut se demander jusqu'où ira réellement l'ouverture d'Intel.


Un futur CPU ARMv8 24 coeurs de Qualcomm

En fabriquant des puces concurrentes, Intel s'ouvre à des comparaisons directes qui pourraient être assez défavorables à ses architectures x86, assez peu adaptées à la basse consommation. L'avantage supposé du process d'Intel, s'il existe, ne pourra plus jouer en la faveur de ses propres solutions pour compenser un éventuel déficit architectural. La structure de marges d'Intel, là aussi très différente de celle des fondeurs tiers, posera là aussi rapidement problème.

Qui plus est, en obtenant la licence Artisan d'ARM, Intel va devoir partager tous les détails techniques, y compris les plus secrets, de son process en ce qui concerne les règles et les dimensions exactes des transistors, ce qui va l'exposer là aussi à une comparaison directe avec les autres acteurs installés du milieu (comme TSMC et Samsung). Il faudra un peu de temps pour mesurer les conséquences concrètes de tout cela, car cet accord ne concerne que le 10nm, un process pour rappel en retard et qui n'est prévu chez Intel que pour la fin de l'année 2017 en version mobile. Les dernières nouvelles du 10nm, sur lequel Intel ne communique pas, n'étaient pour rappel pas particulièrement rassurantes avec l'arrivée possible sur sa roadmap de puces 14nm... pour 2018.

L'ITRS prépare l'après loi de Moore

Publié le 17/02/2016 à 16:18 par Guillaume Louel

C'est la section actualité de la très sérieuse revue scientifique Nature  qui l'affirme : la loi de Moore est arrivée à son terme. Énoncée en 1965 par Gordon Moore, l'un des cofondateurs d'Intel, il s'agit d'une observation par laquelle la quantité de transistors dans les circuits intégrés doublait à peu près tous les ans. Une observation transformée en loi pour prédire que cette cadence pouvait être extrapolée pour les années à venir.

En 1975, la loi avait été révisée pour prendre la forme que l'on connaît actuellement, à savoir un doublement des transistors tous les deux ans. L'importance de la loi de Moore allait cependant au-delà de la simple prédiction puisqu'elle prenait en compte les coûts de fabrication : l'observation se fait sur les puces ayant le coût par transistor le plus faible (tentant donc de prendre en compte les questions de yields et de défauts en fonction de la taille des puces).

Plus qu'une prédiction, la loi de Moore a servie, particulièrement chez Intel, de guide au fil des années, prédisant à l'avance les budgets en nombre de transistors alloués aux ingénieurs, et poussant vers l'avant la nécessité d'investir dans de nouveaux process de fabrications, la fameuse stratégie du Tick-Tock poussée d'abord en interne par Pat Gelsinger au début des années 2000 avant d'être utilisée publiquement pour décrire les générations à venir.

La loi de Moore, quand tout allait bien, ou presque !

De manière intéressante, au-delà d'Intel, c'est toute l'industrie du semi-conducteur qui s'est mise d'accord autour de la loi de Moore, à savoir non seulement les fondeurs, mais aussi et surtout les fournisseurs d'outils. Le besoin de coordination entre tous les acteurs aura conduit à l'élaboration d'une roadmap, d'abord appelée National Technology Roadmap for Semiconductors dès 1993, avant d'être renommée sous sa forme actuelle, l'International Technology Roadmap for Semiconductors (ITRS).

Le rôle joué par cette roadmap, dont la dernière version a été publiée en 2013 aura été particulièrement important ces dernières années où, passé le 90nm, les challenges techniques ont contraint à des changements d'approches importants. L'augmentation des performances par la fréquence, méthode classique aura atteint un plateau à cause de l'augmentation de la consommation, poussant dans le commerce les stratégies de multiplication des coeurs que l'on connaît. Le rôle de la roadmap, au-delà de la concertation, est de s'assurer de trouver des pistes pour continuer la cadence de réduction des coûts/augmentation des transistors de la loi de Moore.

La dernière roadmap ci-dessus donnait des grandes lignes sur la manière de mettre à l'échelle les différents composants des transistors. Après les difficultés autour du 90nm, l'industrie est passé progressivement de la règle dite de la mise à l'échelle géométrique (on réduit tout dans des proportions identiques, le nom du node indiquant en général la taille de la porte) à celle de la mise à échelle par équivalence (equivalent scaling).

Etant donné que différentes parties composant les puces posent des problèmes différents, des règles d'équivalences ont été mises au point pour permettre de continuer a atteindre les buts de réduction des coûts/augmentation de densité imposé par la loi de Moore (on peut voir sur le tableau la couche d'interconnexion M1 et l'écart minimal entre deux transistors FinFET, en passant par des estimations des tailles de blocs fondamentaux comme la SRAM).

Pour 2016, la roadmap annonçait par exemple de la SRAM 6 transistors (6T) haute performance en 10nm autour de 0.048 µm2, ce qui n'est pas très éloigné de ce que présentait Samsung il y a une dizaine de jours de cela. En pratique cependant, on notera qu'on est globalement assez en retard sur la roadmap qui prévoyait des débuts de production à petite échelle en 10nm en 2015 (Risk Start dans la roadmap, suivi de HVM, fabrication en volume). Chez TSMC par exemple, la production risque est prévue pour la fin 2016 avec une production en volume pour 2017. Intel prévoit ses puces en volume pour 2017 également.

Évidemment depuis 2013 les choses se sont un peu plus compliquées et l'absence de roadmap en provenance de l'ITRS n'a pas forcément aidé. En pratique, la réduction des coûts s'est arrêtée, avec même un retour en arrière à 16nm signant de facto la fin de la loi de Moore, comme on peut le voir sur cette estimation ci-dessus tirée d'une présentation de l'ITRS en février 2015.

L'absence de nouvelle roadmap en provenance de l'ITRS aura même donné lieu à des divergences d'interprétations fortes, Intel titillant ses concurrents sur la question de la densité théorique. TSMC et Samsung ont fait pour rappel le choix de conserver un BEOL (Back End of Line, la partie basse d'une puce qui sert à l'interconnexion des transistors) commun entre le 20 et le 16nm pour accélérer la cadence de mise en production. En pratique chez TSMC, malgré le BEOL commun, le half pitch M1 reste tout de même dans les clous à 32nm (entre 40 et 31.8 sur la roadmap).

La densité pratique reste de toute manière très différente de ce que peuvent proposer des formules grossières comme celle utilisée par Intel (qui multipliait le pitch M1 par le pitch entre deux portes), qui pour exploiter les FinFET aura fait le choix d'utiliser pour certains de ses transistors critiques des structures plus larges composées de plusieurs fins (dans des proportions non négligeables même si la proportion exacte est rarement évoquée de manière précise par Intel).

Cumulé a de multiples autres détails (différents types de blocs sont présents avec des densités différentes, de la SRAM aux blocs plus ou moins critiques) il est impossible de tirer grand-chose de la théorie. L'écart entre un Core M Broadwell 14nm fabriqué par Intel (82mm2 pour 1.3 milliards de transistors) et un A8 fabriqué par TSMC en 20nm (89 mm2 pour 2 milliards de transistors) montre qu'il est difficile de comparer quoique ce soit à moins de prendre deux puces strictement identiques. Cela aura été possible pour l'A9 d'Apple, dont la superficie atteint 96mm2 chez Samsung contre 104.5mm2 chez TSMC.

Le mois prochain, l'ITRS devrait donc enfin communiquer une nouvelle roadmap qui d'après Nature tirera définitivement un trait sur la question de la loi de Moore comme moteur d'évolution unique. D'après Nature, la prochaine roadmap se concentrera sur les applications pratiques, allant du smartphones aux puces serveurs et regardera les applications pratiques, que ce soit au niveau circuits d'alimentations, des capteurs nécessaires, ou d'autres blocs de siliciums répondant à des besoins particuliers.

La véritable question est de savoir ce que comportera réellement cette roadmap qui serait rebaptisée d'après Nature International Roadmap for Devices and Systems, abandonnant même le mot transistor !

Ce que l'on sait, c'est que la réorganisation de l'ITRS en 2014 s'est faite autour de groupes de travaux, avec notamment un groupe baptisé « More Moore » pour évoquer les pistes techniques pour les prochains nodes, dont vous pouvez retrouver ci-dessous la dernière présentation datant de février 2015.

 
 

Une présentation intéressante qui évoque de multiples pistes et où l'on trouve un début de roadmap que nous avons remis ci-dessous :

En pratique, après l'ère de la mise à l'échelle géométrique, et l'ère des équivalences, l'ITRS évoque l'ère du "3D Power Scaling" dont les meilleurs représentants sont la NAND 3D ou des technologies comme la mémoire HBM. Des techniques complexes à appliquer aux puces logiques même si la présentation évoque quelques pistes et alternatives.

On attendra donc le mois prochain pour en savoir un peu plus !

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