HardWare.fr


Ivy Bridge et mémoire DDR3
DiversMémoires
Publié le Vendredi 3 Mai 2013 par Guillaume Louel

URL: /articles/892-1/ivy-bridge-memoire-ddr3.html


Page 1 - Introduction

La question de l'adéquation entre la mémoire et les processeurs n'est pas nouvelle. Dans un précédent dossier, nous avions d'ailleurs fait le tour de la question avec les architectures de l'époque et, déjà, la mémoire DDR3.

Nous avions tiré plusieurs conclusions intéressantes qui peuvent nous servir de point de départ aujourd'hui. D'abord, avec la mémoire DDR3, la question de la latence (le temps nécessaire pour récupérer une information) passe en général au second plan par rapport à la bande passante mémoire (la quantité d'information que l'on peut rapporter par seconde). En effet, les processeurs modernes disposent de mécanismes (prefetchers, systèmes de prédiction, ordonnancement des instructions…) excessivement efficaces pour masquer au mieux la latence.

Ensuite, les architectures modernes sont en général à même de tirer partie de mémoire rapide, c'est ce que nous avions noté avec une tendance dans les applications à voir les gains s'amenuiser lorsque l'on atteint les fréquences les plus élevées (DDR3-2133 à l'époque).


Aujourd'hui, nous allons revenir sur la question avec les processeurs Ivy Bridge d'Intel. Là où les Sandy Bridge ne permettaient pas de dépasser la DDR3-2400 côté mémoire, cette limite a été levée et certaines cartes mères proposent de monter à 3000, voire 3200. La carte mère peut en effet, à ces fréquences, devenir un facteur limitant même si ces barrettes sont pour l'instant très rares.

L'autre évolution majeure concerne la mémoire DDR3 en elle-même. Avec une mémoire DDR4 qui n'est pas prévue avant 2014 (sur les plateformes Haswell-EX chez Intel), les constructeurs essayent de se dégager du marché assez morose (bien que fluctuant) en proposant des cadences toujours plus élevées pour des prix, eux aussi, élevés. On trouve désormais des barrettes DDR3-2666 et DDR3-2800 dans les magasins, et des modèles DDR3-3000 ont même été annoncés par certains constructeurs.

Allons donc voir ce que ces mémoires donnent en pratique !


Page 2 - Corsair Dominator Platinum DDR3-2666 et 2800

Afin de réaliser notre test, Corsair nous a fourni deux kits mémoires assez similaires. Il s'agit de kits issus de la gamme Dominator Platinum et qui portent les références CMD8GX3M2A2666C11 et CMD8GX3M2A2800C12.


Il s'agit de kits de deux barrettes de 4 Go (pour un total de 8 Go) qui proposent les caractéristiques et timings suivants :
- DDR3-2666, CL11-13-13-35-2
- DDR3-2800, CL12-14-14-36-2

Dans les deux cas, ces timings sont atteints via un profil XMP inclus dans les barrettes (un seul profil est inclus), ce profil augmentant la tension de la mémoire à 1.65V. (la tension normale de la mémoire DDR3 est pour rappel de 1.5V, mais les kits "overclockings" montent en général à 1.65V, limite commerciale maximale tolérée par les processeurs Intel dont le contrôleur mémoire est inclus, pour rappel, dans le processeur). Si vous n'activez pas le profil XMP, dans les deux cas les barrettes seront reconnus comme de la mémoire DDR3-1333 9-9-9-24-1 à 1.5V.

Les Dominator Platinum disposent d'un système de refroidissement que la marque appelle DHX, deux parois en aluminium recouvrent de chaque côté de la barrette les puces mémoires. Elles se rejoignent en haut sur un radiateur à ailettes. L'aspect solidité se ressent.


Particularité des kits Dominator Platinum, on retrouve en plus ce qui ressemble à une poignée au dessus de la barrette, vissée sur les côtés. Outre l'aspect pratique, cette poignée est creuse et abrite une barre lumineuse reliée à des leds sur le PCB de la mémoire. On verra donc à l'allumage une lumière blanche sortir de sous cette barre. Les amateurs de tuning noteront que le constructeur vend sur son site une barre de rechange qui permet d'obtenir une lumière bleue.


Autre particularité de ces barrettes, la présence d'un connecteur 5 broches sur le côté de la barrette. Baptisé "Corsair Link", il permet de brancher un câble (non fourni) pour relier la mémoire à un système de monitoring du constructeur baptisé AirFlow Pro (un kit de LEDs indiquant l'activité et la température qui s'ajoute lui-même par-dessus un kit de deux ventilateurs qui se fixent par-dessus la mémoire, AirFlow 2).

Dernier point, notez que ces barrettes mesurent 5.5 cm de hauteur. Attention à vérifier si ces dernières s'insèrent dans votre système et ne buttent pas avec un système de refroidissement un peu trop large.

Configuration de test

Pour effectuer nos tests, nous avons utilisé la configuration suivante :

- Processeur Intel Core i5 3570K
- Carte mère Asus Maximus V Formula
- Kits mémoire Corsair CMD8GX3M2A2666C11 et CMD8GX3M2A2800C12
- Carte Graphique Nvidia GeForce Titan

Afin de mettre en avant le gain potentiel des hautes fréquences mémoires, nous avons overclocké notre processeur à 4.5 GHz (Turbo Off). Côté applicatif, nous avons opté pour des tests théoriques (Aida 64, RightMark Multithread Test) ainsi que des tests pratiques dans diverses applications (7-Zip et x264) et jeux (StarCraft 2 et Arma 2). Nous reviendrons également sur l'influence de la mémoire avec l'IGP. Passons aux tests !


Page 3 - Latence, bande passante mémoire

Pour tous les tests qui suivent, vous verrez que nous avons fait varier la DDR3 entre -1600 et -2800. Comme nous l'indiquions dans notre test d'Ivy Bridge, en plus des paliers traditionnels de 267 MHz, des paliers de 200 MHz ont été ajoutés. En plus des fréquences classiques représentées par les modes DDR3-1600, 1866, 2166, 2400 et 2666, nous avons complétés nos tests par les modes intermédiaires suivants : DDR3-2000 et DDR3-2800. Nous avons écartés les modes DDR3-1800 et 2200, trop proches des modes 1866 et 2133 pour être réellement intéressants dans nos tests. Sachez que ces modes sont tout de même disponibles. Notez enfin que nous utilisons, en dessous de 2400 MHz en CR1, au dessus en CR2 (modes 2400, 2666 et 2800). Nous utilisons les profils XMP de nos barrettes en 2666 et 2800.

Latence

Commençons notre fournée de tests synthétiques avec la latence, mesurée via l'utilitaire Aida 64. Il s'agit d'une mesure en nanosecondes.


Le contrôleur mémoire intégré à Ivy Bridge propose ici des latences très basses à 4.5 GHz. On passe sous les 32ns avec notre kit 2800 dans son timing XMP.

Bande passante mémoire monothread

Nous utilisons le test mémoire intégré à Aida 64 pour mesurer la bande passante mémoire monothread, c'est-à-dire la capacité d'un seul cœur à lire ou écrire en mémoire.



[ Lecture ]  [ Ecriture ]

Les chiffres de bande passante mémoire obtenus sont assez élevés, on atteint les 25 Go/s en lecture avec notre kit DDR3-2800. Qu'en sera-t-il en mode multithread ?

Bande passante mémoire multithread

Nous utilisons maintenant le test mémoire multithread disponible dans la suite RightMark .



[ Lecture ]  [ Ecriture ]

Visiblement, quelque chose change en 2666 et 2800 puisque nous obtenons des chiffres de bande passante multithread, certes supérieurs à la bande passante monothread, mais bien trop modestes, particulièrement en écriture.

Comme indiqué plus haut, nous utilisons pour les modes 2666 et 2800 les profils XMP. Nous avons donc recrées dans le BIOS de manière manuelle ces modes avec un même résultat. En tentant d'autres fréquences, nous avons noté que passé le mode DDR3-2400, le comportement de la mémoire dans RMMT change avec une chute des performances théoriques dès le mode DDR3-2600.

Nous avons noté une différence de performances similaire sur une autre carte mère, une Asus Z77-V Pro : passé 2400 le comportement du contrôleur devient différent malgré des timings (primaires et secondaires) qui n'évoluent pas. Le fait que cela se passe au-delà de 2400, ancien seuil de compatibilité de Sandy Bridge peut laisser penser que cela est lié au processeur. Cependant il est aussi fortement possible que cela soit lié à certaines "optimisations" effectuées par le BIOS pour atteindre ces fréquences très hautes. Nous n'avons pas réussi par exemple à faire fonctionner les kits de manière stable sur une MSI Z77A-GD65.

Nous verrons si, en pratique, cela a un impact ou non, les tests théoriques n'étant qu'assez rarement représentatifs des performances applicatives.


Page 4 - Performances applicatives

Nous avons choisis deux applications distinctes pour évaluer les performances, d'un côté 7-Zip que nous avions noté pour être très réactif à la bande passante, et de l'autre x264 qui profite d'une manière plus limitée. Vous pouvez retrouver ces tendances sur cette page de notre test d'Ivy Bridge.

7-Zip

Nous mesurons le temps de compression en secondes sous 7-Zip. Nous utilisons l'algorithme LZMA2.


Changer de mémoire est particulièrement bénéfique sous 7-Zip. Entre le mode 1600 CL9 et le mode 2800, on trouve un gain qui atteint les 12.2%. On notera que si la bande passante reste le facteur le plus important, limiter la latence offre en général des gains assez nets.

x264

Passons désormais à une application qui profite significativement moins d'une bande passante mémoire plus élevée, le logiciel de compresion vidéo x264. Nous mesurons le temps de compression total en mode fast 2 passes.


Ici les gains sont bien plus mesurés puisque l'on atteint à peine les 2%.

Regardons maintenant ce qui se passe dans les jeux.


Page 5 - Performances dans les jeux

Nous regardons les performances dans deux jeux issus de nos tests processeurs. Nous utilisons pour rappel ici une carte graphique Nvidia GeForce Titan, les jeux sont testés en 1080p toutes options au maximum (sauf anti-aliasing). Le premier titre que nous avons choisis, StarCraft II, profite fortement de la mémoire tandis que le second, Arma II, profite moins.

StarCraft II

Nous mesurons le nombre d'images par seconde dans le replay d'une attaque massive et excessivement stressante pour la machine.


La scène est excessivement gourmande, on est très très loin d'être limité par la carte graphique et le moteur monothread de StarCraft II est une condition propice à ce que la mémoire joue un rôle important. En pratique on trouvera un gain qui peut atteindre jusque 10% ce qui est assez important. La latence joue un rôle, particulièrement dans les fréquences les plus basses.

Arma II

Nous mesurons le nombre d'images par secondes sur un déplacement prédéfini.


Les gains que l'on obtient ici sont plus mesurés, ils se limitent à 4.5% avec des performances identiques dans les deux modes XMP. La latence joue un rôle assez important, même si comme toujours la fréquence prime.


Page 6 - Performances IGP

Nous avons également souhaité jeter un œil à l'impact de la mémoire sur les performances de l'IGP intégré à Ivy Bridge. Ce dernier partage en effet la mémoire avec le système pour rappel.

Batman Arkham City

Nous mesurons le nombre d'images par secondes obtenues en mode 720p.


Petite surprise ici, nous trouvons pour la première fois une conséquence pratique au comportement que nous avions observés sur la mesure de bande passante multithreadée via RightMark. L'impact est assez mesuré mais l'on se retrouve avec des performances légèrement inférieures dès que l'on dépasse le mode DDR3-2400, quelque chose que nous avons confirmé à 2600 MHz également. Le mode de fonctionnement de l'IGP qui requiert une grande bande passante mémoire et qui n'est pas limité par le potentiel des cœurs est probablement la situation la plus proche de celle de la situation théorique d'un test mémoire multithread.


Page 7 - Conclusion

Avec Ivy Bridge, Intel a ouvert la porte un peu plus à l'overclocking mémoire, permettant de dépasser la limite de la DDR3-2400. Une bonne chose qui permet aussi aux marques de mémoire de proposer des barrettes haut de gamme qui montent fortement les fréquences.

Des fréquences hautes qui ne sont pas forcément faciles à atteindre pour toutes les cartes mères comme nous en avons fait l'expérience, malgré la détection correcte des profils XMP. C'est un point qu'il faudra garder à l'esprit si vous vous intéressez à ce type de mémoire.

En pratique, nous avons pu noter des gains assez significatifs dès que l'on augmente la bande passante mémoire. Dans les cas les plus critiques, ces gains peuvent monter à 10 et 12% entre de la mémoire "traditionnelle", de la DDR3-1600 et de la DDR3-2800. Les gains que l'on peut noter en 2133 ou 2400 ne sont cependant pas ridicules et méritent d'être notés.


C'est l'occasion d'ailleurs d'évoquer plus spécifiquement les kits de Corsair. Bien finis, les barrettes se sont comportées comme attendues sur notre carte mère haut de gamme, la Maximus V Formula qui a accepté sans problèmes les timings indiqués. Il est important de noter que cela ne sera pas forcément le cas de toutes les cartes mères. Outre les problèmes que nous avons évoqués avec la MSI Z77A-GD65, notez que si la P8Z77-V Pro d'Asus a accepté le kit DDR3-2666, il nous aura été impossible sur cette dernière d'activer le profil XMP du kit DDR3-2800. Les constructeurs de cartes mères tiennent peut être là, enfin, un argument pour distinguer leurs modèles très haut de gamme.

Cela ne veut cependant pas dire que ces kits sont inutilisables sur d'autres cartes mères, mais il faudra modifier manuellement les timings en fonction de ce qu'elle est capable d'encaisser. Nous vous recommandons, si ces kits vous intéressent, de vérifier la compatibilité au préalable auprès du constructeur de carte mère, ou du fabricant de mémoire.


Bien entendu, qui dit mémoire extrême dit prix extrêmes et les kits de Corsair que nous avons utilisés se négocient respectivement pour 175 et 300 euros environ. Un prix qui refroidira plus d'un acheteur potentiel, particulièrement pour le modèle 2800, dès lors qu'on s'intéresse au rapport performance / prix.

Cela ne veut cependant pas dire qu'il faut tirer un trait sur de la mémoire rapide. Par rapport à des kits 8 Go qui se négocient aux alentours de 60 euros pour de la DDR3-1600 CL9, on peut trouver pour une dizaine d'euros de plus de la mémoire 2133. La mémoire 2400 de son côté se négocie pour 20 à 30 euros de plus que la mémoire 1600. A ce prix - et si votre budget le permet - acheter de telles barrettes peut faire sens selon l'usage de votre machine. On pense par exemple aux configurations de jeu : ces derniers profitent en général d'une augmentation de la bande passante mémoire, à condition bien sur de se trouver dans une situation ou mémoire et CPU sont les facteurs limitant.


Copyright © 1997-2024 HardWare.fr. Tous droits réservés.